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La Tunisie n'a aucune raison de craindre la crise financière mondiale, affirment les responsables du gouvernement. Un avis que ne partagent pas les experts économiques.



Il est inutile de s'inquiéter quant à une propagation en Tunisie de la "contagion" de la crise financière mondiale. Telle a été l'une des assurances données vendredi 10 octobre lors d'une conférence de presse par le Gouverneur de la banque centrale de Tunisie, Taoufik Baccar.

La situation financière de la Tunisie est différentes à de nombreux égards, a déclaré M. Beccar, l'une des raisons en étant que les taux de prêt ne sont pas aussi élevés que dans d'autres pays.

"Le total de ces prêts ne dépasse pas 10 pour cent du produit national brut", a-t-il déclaré, "contre 87 pour cent aux Etats-Unis."

Selon M. Beccar, une propagation de la crise mondiale à l'économie tunisienne est "théoriquement impossible", parce que les autorités financières nationales contrôlent les trois canaux par lesquels cette crise pourrait frapper la Tunisie : l'investissement en devises étrangères, le recours aux marchés financiers mondiaux, et l'investissement étranger sur les marchés des actions en Tunisie.

Une étude publiée en août dernier par un institut de recherche indépendant du Syndicat Général du Travail vient étayer les déclarations de M. Beccar.

"L'économie et la société tunisiennes sont marquées par des caractéristiques communautaires et de production que l'on peut considérer comme des facteurs d'immunité [face aux] crises", explique cette étude. "Cette situation résulte de la diversité de la base de la production industrielle et de la quasi auto-suffisance dans le secteur de l'alimentation, ainsi que de la présence d'un secteur des services très ouvert, générateur d'entrée de devises étrangères solides. De plus, le pays compte une classe moyenne importante. "

Mais cette étude met également en garde contre ce qu'elle appelle "le recul de l'Etat dans son rôle de régulateur et sa méfiance envers les politiques économiques actives conformes aux nouvelles tendances libérales ; une chose qui pousse le pays à vivre sur ses réserves plutôt qu'à les alimenter. En conséquence, la capacité d'endurance est sur le point d'atteindre un point critique."

Les experts financiers restent sceptiques face à l'optimisme officiel.

"Nous devons veiller à ne pas céder aux déclarations trop optimistes", a déclaré l'un de ces experts à Magharebia, sous couvert de l'anonymat. "L'arrivée de la crise en Europe signifiera nécessairement moins d'investissements et moins de transferts de nos ressortissants à l'étranger. De plus, la demande européenne de produits tunisiens pourrait se réduire, et le nombre de touristes européens se rendant en Tunisie pourrait également être revu à la baisse."

La Tunisie dépend fortement du commerce et de ses relations avec l'Union Européenne.

Le 9 octobre, le Président Zine El Abidine Ben Ali a annoncé la mise en place d'une nouvelle commission chargée de surveiller la situation économique et financière mondiale. Lorsque cela s'avérera nécessaire, cette commission proposera des mesures destinées à renforcer le développement du pays et à apporter des réponses aux impacts négatifs de la situation mondiale.

Le Tunisien moyen n'est quant à lui pas inquiet.

"Comme tous les Tunisiens, je suis les informations sur cette crise, mais je n'ai rien changé à mes habitudes", explique Bechir Ben Brahim, en faisant ses courses dans un grand centre commercial.

"Je n'ai rien remarqué de différent chez les autres clients", explique-t-il. "La frénésie des achats n'a pas eu lieu, comme ce fut le cas à d'autres occasions."

Brahim affirme ne pas voir comment cette crise pourrait affecter sa vie quotidienne.

Depuis l'indépendance, les gouvernements successifs ont maintenu un cap : la diversification des recettes de l'Etat. Les sources de revenu de l'Etat en devises étrangères proviennent de l'agriculture, du tourisme, des exportations, et des transferts effectués par la communauté des expatriés en Europe.

"Je pense qu'en Tunisie, nous avons la capacité à assimiler toutes les crises et toutes les catastrophes, y compris des catastrophes naturelles", affirme Samiha Guizani.

"Nous n'avons ni pétrole à exporter, ni or à vendre ; nous nous contentons de prendre un peu de tout, y compris des désastres qui frappent les autres."

Par Jamel Arfaoui pour Magharebia à Tunis – 15/10/08

Tag(s) : #articles de presse
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